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dimanche 13 décembre 2015

Chronique lecture: "La nostalgie heureuse" d'Amélie Nothomb



"Tout ce que l’on aime devient une fiction. La première des miennes fut le Japon. A l’âge de cinq ans, quand on m’en arracha, je commençai à me le raconter. Très vite, les lacunes de mon récit me gênèrent. Que pouvais-je dire du pays que j’avais cru connaître et qui, au fil des années, s’éloignait de mon corps et de ma tête ? "


     Et voilà, la semaine spéciale « Amélie Nothomb » touche à sa fin. Aujourd’hui, c’est « La nostalgie heureuse » que je vais vous présenter. C’est le livre le plus récent de ces trois chroniques, il date de 2013. C’est un peu la cerise sur le gâteau, ou les fines bulles d’un bon champagne de cette semaine : mon coup de cœur de cette sélection. J’espère que cette petite semaine spéciale vous aura plu. Je dois admettre que, cette pile de livres à chroniquer n’était qu’un prétexte pour organiser cette mise en avant d’Amélie Nothomb, cet ovni de la littérature que j’affectionne particulièrement.

     « La nostalgie heureuse » est un récit autobiographique et retrace le dernier voyage d’Amélie Nothomb au Japon dans le cadre d’un reportage pour France 5. Cela faisait seize ans qu’elle n’était pas retournée dans son pays natal et elle n’a pas cessé d’imaginer ce que sont devenu les lieux de son enfance, les personnes qu’elle y a rencontré et qui ont compté... L’auteure nous raconte ses émotions, ses impressions mais évoque aussi ses rapports avec la langue apprise dans son enfance, puis oubliée, ses souvenirs…Elle va se poser une question essentielle : comment renouer avec la réalité d’un lieu, avec des personnes que l’on a connues des années auparavant et que l’on a fait vivre jusqu’alors simplement par le biais des souvenirs ?

     J’ai aimé retourner au Japon en compagnie d’Amélie Nothomb, y retrouver Nishio-San, sa nourrice tellement aimée dans « Métaphysique des tubes » et Rinri, son amour de jeunesse dont on a suivi l’histoire dans « Ni d’Ève ni d’Adam ». Avec ce livre, on est loin du cynisme et de l’univers décalé d’Amélie Nothomb. Ici, elle nous plonge dans un condensé d’émotions, de tendresse et de nostalgie. J’ai eu l’impression de découvrir une autre facette de cette auteure, et quel bonheur ! J’ai beau aimer son style déjanté, il est agréable de la découvrir avec une plume beaucoup plus douce mais toujours avec son trait d’humour si singulier. Et, si l’histoire est très personnelle, les questions qu’Amélie Nothomb soulèvent sont universelles. De ce fait, ce roman fait beaucoup réfléchir. On tourne autour des thèmes du souvenir, de la fidélité de la mémoire, de l’oubli. Nos souvenirs sont-ils fidèles à ce qu’a été la réalité ? Comment réagirions-nous face à des retrouvailles inespérées ? Quelle réaction avoir face à une urbanisation exponentielle ? Comment réagir face au changement ? Etc… Beaucoup de questions que tout le monde pourrait être à même de se poser et qui nous plongent dans nos propres souvenirs.

     Pour conclure, je dirais que ce roman se dévore. Il est pour moi un vrai coup de cœur. Je ne peux que le conseiller. Même si, pour le savourer au mieux, je pense qu’il vaut mieux avoir lu « Métaphysique des tubes », « Stupeur et tremblement », et « Ni d’Ève ni d’Adam » dont des références sont évidentes. Alors, êtes-vous prêts pour un plongeon vers le passé d'Amélie Nothomb et le votre?


Fiche technique:
Titre: La nostalgie heureuse
Auteure: Amélie Nothomb
Éditeur: Le livre de poche
Nombre de pages: 160
Prix: 6,10 €

Extraits:
"A quoi sait-on qu’une personne âgée n’a plus toute sa tête ? Il y a comme un flottement. Ce n’est pas elle qui est perdue face à nous, c’est nous qui sommes perdus face à elle. Elle détient un savoir capital : elle connait l’art de ne plus assimiler ce qu’elle refuse. Nous voudrions tous être capables de ce prodige."

"Cette planète nous propose son échelle: comment pourrions-nous nous sentir petits sur une terre qui nous en met plein la vue? La belle affaire d'apprendre que Jupiter et le Soleil nous surpassent jusqu'à la démesure! La plupart d'entre nous ne pourront vérifier cette disproportion de leurs yeux, et ce dont on n'a pas fait l'expérience sensorielle nous importe aussi peu que les phrases rabachées à l'école Alors que chacun d'netre nous peut contempler la mer, peut escalader une montagne et regarder autour de soi, peut tomber amoureux: l'immensité est mille fois, dix millions de fois plus à notre portée que le minuscule."

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